Le ton monte d’un cran entre les opérateurs et l’Etat au sujet du cas Huawei. Le président de la Fédération française des télécoms estime que l’Etat devra indemniser les opérateurs s’il décide de bannir l’utilisation des équipements 5G du fabricant chinois.
Une incertitude plane toujours sur le déploiement de la 5G en France, et même en Europe : les opérateurs pourront-ils utiliser des équipements de Huawei. Le fabricant chinois est en effet dans la tourmente du fait de son conflit avec le gouvernement américain, notamment pour des potentiels risque d’espionnages par la Chine à travers ses équipements.
Le président de la Fédération française des télécoms, regroupant notamment Bouygues Telecom, SFR et Orange, s’est exprimé sur le sujet dans une interview pour Les Echos. Il déplore la politique du cas par cas prônée par la France, estimant que “dans ces conditions, il est impossible pour les opérateurs télécoms d’établir des plans d’affaires pérennes.“. Car en effet, Bouygues, SFR, Orange et Free devront obtenir une autorisation de l’ANSSI s’ils souhaitent utiliser les équipements de Huawei sur le territoire français, les premières autorisations ou refus seront rendues en février.
Cette politique du cas par cas laisse les opérateurs dans une zone de flou jusqu’aux premières décisions rendues publiques. “Cette loi, qui devait clarifier la situation, a plongé les opérateurs dans un nuage d’incertitude, qui les empêche de faire leur métier, celui de déployer des réseaux numériques performants pour les Français, les entreprises, les collectivités ou les administrations.” estime Arthur Dreyfuss dans son entretien. Pour lui, “les nouvelles règles ne sont pas claires” et “l’Etat les change en cours de match”, une situation qu’il juge “inacceptable”‘.
Pour le président de FFT, le choix du gouvernement de reprendre son rôle pour le choix de l’équipementier doit être assumé jusqu’au bout. “Ce n’est pas aux opérateurs, aux Français, aux entreprises, aux territoires, de payer ce changement de doctrine“, assène-t-il en citant l’exemple des Etats-Unis : “Aux Etats-Unis, la décision d’interdire Huawei a pour corollaire d’accompagner les opérateurs opérationnellement et financièrement.“. Donc en clair, les opérateurs estiment avoir le droit à une compensation financière s’ils ne peuvent pas utiliser d’équipement Huawei.
En effet, certains opérateurs membres de la FFT pourraient payer cher l’interdiction d’utiliser les équipements chinois. C’est notamment le cas pour Bouygues Telecom et SFR: s’ils n’obtiennent pas d’autorisation de passer par Huawei, tous deux seraient dans l’obligation de remplacer leurs antennes 3G et 4G pour des raisons de compatibilité. De même, leur réseau serait par conséquent impacté pendant de nombreux mois et les abonnés pourraient filer à la concurrence. Sans Huawei, le coût du déploiement de la 5G en France augmenterait de 8 % à 29 % au cours des 10 prochaines années. De son côté Free n’est pas concerné puisque l’opérateur a signé un partenariat avec Nokia. Orange ne dispose pas d’antennes du géant chinois mais souhaite avoir la possibilité de se tourner vers lui.